Auto-injection par inadvertance : Le risque associé aux vaccins à base d’huile

 Boehringer Ingelheim Santé Animale Canada Inc.
porcs

La sécurité des travailleurs est de la plus haute importance dans tout environnement agricole, particulièrement lors de la manipulation de vaccins ou de produits vétérinaires. Ces substances contribuent grandement à la santé et au bien-être des animaux de ferme, mais elles présentent aussi des risques pour les travailleurs agricoles si elles ne sont pas manipulées correctement. Les vétérinaires doivent informer leurs clients de la nature des médicaments prescrits, y compris de tout danger associé, et de leur élimination sécuritaire1. Cette responsabilité s’applique aussi une fois que le médicament est entre les mains de l’utilisateur final, c’est-à-dire les travailleurs agricoles et les éleveurs. Ce bulletin « Nouveautés et actualités » vise à mettre en évidence le risque associé à l’utilisation de certains produits vétérinaires et à souligner certaines différences dans la composition des vaccins qui devraient être prises en considération lors du choix d’un protocole.

Les blessures par piqûre d’aiguille subies par les utilisateurs finaux sont un risque inhérent à toute intervention médicale nécessitant la manipulation d’aiguilles. Une attention et des efforts considérables ont été déployés pour réduire les blessures par piqûre d’aiguille en médecine humaine. Les agents pathogènes viraux transmissibles par le sang, tels que le virus de l’hépatite B, le virus de l’hépatite C et le virus de l’immunodéficience humaine (VIH), pour ne nommer que ceux-là, ont été le principal moteur du changement de perception en médecine humaine2.

Les blessures accidentelles par auto-injection sont fréquentes chez les vétérinaires et les travailleurs agricoles. Dans ces populations, selon Rubin et ses collaborateurs, la fréquence des injections accidentelles au cours de la vaccination des animaux tout au long de la vie varie de 64 à 93 %3. Dans certains pays, des taux de 9 à 75 blessures pour 100 personnes-années de pratique ont été signalés4. C’est probablement le cas lors de la manipulation d’injecteurs automatiques utilisés pour la vaccination de masse des animaux, tels que ceux utilisés dans les élevages de porcs. De plus, l’incidence est probablement beaucoup plus élevée, car ces blessures ne sont généralement pas signalées. Lors d’un sondage mené par l’American Association of Swine Practitioners (AASP), selon les 586 personnes interrogées ayant signalé une blessure par piqûre d’aiguille, les vaccins étaient la cause d’exposition la plus courante (40 % ± 2)5. Heureusement, la plupart de ces blessures n’entraînent aucun symptôme ou que des symptômes légers disparaissant spontanément. Certaines blessures, cependant, peuvent entraîner des répercussions graves. Si le vaccin contient un adjuvant huileux, il y a une probabilité augmentée de provoquer des conséquences fâcheuses2,6,7.

L’auto-injection d’un vaccin à base d’huile destiné aux animaux peut déclencher une réaction douloureuse à un corps étranger et potentiellement causer une réaction granulomateuse chronique, parfois compliquée par la formation d’un abcès stérile au site d’injection6. Un granulome est une zone d’inflammation localisée caractérisée par l’accumulation de cellules immunitaires et la formation de nodules. Les granulomes peuvent apparaître en réaction à des substances étrangères, y compris des composants de vaccins, lorsque l’organisme tente d’isoler et de contenir le matériel injecté. L’auto-injection se fait généralement dans la main. Dans le cadre d’une étude rétrospective menée en 2022, tous les patients avaient une blessure à la main non dominante, le plus souvent au pouce ou à un autre doigt. La durée moyenne d’hospitalisation était de 3,75 jours (1 à 10). Chez un tiers des patients, un débridement chirurgical majeur et un drainage ont été nécessaires pendant l’hospitalisation3.

Sur le plan anatomique, les mains sont dépourvues de zones tampons, telles que la graisse, et ont une structure complexe avec de nombreuses artères terminales et de nombreux nerfs et tendons, ce qui contribue à la gravité et à l’étendue des complications par rapport à d’autres parties du corps humain. Les produits à base d’huile ont tendance à se disperser lorsqu’ils sont injectés dans la gaine tendineuse et entraînent donc des conséquences sur une zone plus grande. Par exemple, l’auto-injection par inadvertance d’un vaccin pour bovins à base d’huile dans le doigt d’un ouvrier agricole a entraîné l’amputation du doigt en raison d’une nécrose ischémique, causée par une pression accrue dans la gaine du tendon fléchisseur8. De plus, il ne faut pas oublier le risque potentiel d’infection 
ou d’effets indésirables dus à d’autres composants du vaccin, en particulier dans les conditions d’exploitation agricole4. Selon Windsor et ses collaborateurs, plusieurs patients blessés, interrogés sur la pertinence des conseils figurant sur l’emballage du produit ou dans la notice d’accompagnement, ont admis qu’ils ne les avaient pas lus, mais ont suggéré que des avertissements plus clairs pourraient permettre une évaluation médicale et une intervention chirurgicale plus rapides, le cas échéant7. Cela explique pourquoi l’étiquette des vaccins à base d’huile porte généralement une mention invitant à la prudence lors de l’injection afin d’éviter de s’auto-injecter le produit, ce qui pourrait provoquer une réaction locale grave. Par conséquent, toute auto-injection d’un vaccin à base d’huile doit être traitée sérieusement et de toute urgence.

Les travailleurs agricoles reçoivent généralement une formation sur la manipulation, l’entreposage et l’administration des vaccins et des produits vétérinaires, mais les risques associés à ces substances sont souvent négligés. La priorité accordée à la sécurité des travailleurs ne protège pas seulement le bien-être des individus, elle contribue aussi à la réussite globale et à la pérennité de l’exploitation agricole. Une communication efficace entre les dirigeants de la ferme, les travailleurs et les vétérinaires est essentielle pour garantir la sécurité des travailleurs.

De nos jours, avec le roulement rapide des employés agricoles, parfois d’origine étrangère, il faut tenir compte du fait que les nouveaux travailleurs inexpérimentés n’ont pas toujours les connaissances de base sur les blessures par piqûre d’aiguille et sur les risques associés à certains produits. Il est bien connu qu’un entreposage et une manipulation appropriés des vaccins et des produits vétérinaires sont essentiels pour préserver leur efficacité, mais des efforts restent à faire pour prévenir les expositions accidentelles. Selon le Health and Safety Executive (HSE) du Royaume-Uni, des mesures de contrôle efficaces sont nécessaires lors de l’administration de médicaments vétérinaires aux animaux de ferme afin de réduire les risques pour la santé humaine. Le HSE recommande vivement de privilégier un produit vétérinaire moins dangereux, c’est-à-dire un vaccin à base d’eau plutôt qu’à base d’huile9.

Par prudence, les vétérinaires et les cabinets vétérinaires, lorsqu’ils délivrent ou prescrivent des traitements injectables, doivent aborder de manière proactive des questions telles que le risque lié aux matières biologiques dangereuses dans le contexte des blessures par piqûre d’aiguille, en particulier les vaccins à base d’huile. Aucun des vaccins porcins de Boehringer Ingelheim des familles FLEX et EnterisolMC ne contient d'adjuvants huileux, ce qui les rend plus sûrs non seulement pour les porcs, mais aussi pour les personnes qui s’en occupent. 

Références :

1. Code de déontologie des médecins vétérinaires du Québec, section II : « Devoirs envers le client », chapitre 2 : « Intégrité », article 9, (M-8, r. 4 / 3 de 13), éditeur officiel du Québec, mise à jour au 1er décembre 2022
2. Weese JS, et al. Needlestick injuries in veterinary medicine. Can Vet J. 2008; 49:780–784
3. Rubin G, et al. Hand function following accidental automatic animal syringe injector injuries. Nature Scientific Reports. 2022; 12:21061 
4. Burke F, et al. Needlestick and inoculation injuries in veterinary and animal workers. In Practice. 2017; 39: 138-41.
5. Hafer A, et al. Occupational hazards reported by swine veterinarians in the United States. J. Swine Health Prod. 1996; 4: 128–141 
6. Jones D. Accidental self-inoculation with oil-based veterinary vaccines. N Z Med J. 1996; 109:363–365
7. Windsor PA, et al. Injury caused by self-inoculation with a vaccine of a Freund’s complete adjuvant nature (Gudair ™) used for control of ovine paratuberculosis. Australian Veterinary Journal. 2005; Volume 83, No 4: 216-220
8. O’Neill J, et al. The effects of injection of bovine vaccine into a human digit: A case report. Environmental health A global access science source. 2005; 4:21.
9. Site web du Health and Safety Executive du Royaume-Uni. Guidance recommendation, Veterinary medicines: Safe use by farmers and other animal handlers; 2012 (évalué en mai 2023)