La télémédecine, c’est avant tout de la médecine

Timothée Audouin, consultant en e-santé vétérinaire, accompagne les entreprises dans leur développement vers la santé digitale. Parmi ses sujets de prédilection, la télémédecine, qui, à la faveur du premier confinement, est autorisée à titre expérimental pendant 18 mois depuis le 5 mai 2020.

Des freins plus importants côté praticien que propriétaire

Petits et grands, jeunes ou plus âgés, nous avons tous passé un cap digital pendant la crise de la COVID-19. Le digital a favorisé le télétravail et permis à de nombreuses personnes âgées ou isolées de garder le lien avec leurs familles et amis. Ces mêmes personnes ont compris l’intérêt de la télémédecine. Dans la mesure où ils peuvent échanger avec leur vétérinaire habituel, en qui ils ont confiance, la télémédecine n’est pas forcément un frein. Au contraire, elle peut être un confort, en leur évitant un déplacement. Tous les vétérinaires ont une fraction de leur clientèle qui peut être intéressée par ce service s’il est proposé à bon escient.
Or certains praticiens ne s’imaginent pas faire un diagnostic à travers un écran et ont peur d’y perdre leur statut et leur âme… C’est surtout la volonté de bien faire et de ne pas se tromper qui les freine : « Et si je passais à côté d’une pathologie grave ? En ne voyant pas l’animal, en ne le touchant pas, j’ai peur de l’erreur de diagnostic ».

Un outil supplémentaire dans l’arsenal thérapeutique

Toutes les pathologies ne peuvent pas être gérées en télémédecine et la consultation à la clinique sera toujours indispensable pour une majorité de cas. Mais la téléconsultation peut présenter un intérêt, alternée avec des consultations en présentiel. Le vétérinaire « téléconsultant » doit connaître l’animal, lequel doit avoir bénéficié d’une consultation physique depuis moins d’un an. De même, des antibiotiques critiques ne pourront pas être prescrits lors d’une téléconsultation.
Tous les clients ne souhaiteront pas bénéficier d’une téléconsultation. Il est important de considérer la télémédecine comme un outil supplémentaire dans l’arsenal thérapeutique, et seulement un outil. La télémédecine, c’est avant tout de la médecine !
Nous ne révolutionnerons pas la médecine, qui reste notre cœur de métier. Nous bénéficions simplement d’un moyen complémentaire pour apporter le meilleur service aux propriétaires d’animaux.

Le Dr. Elise Bernard témoigne de son expérience

« En post-opératoire ou lors d’une hospitalisation, la télémédecine est un outil précieux »

Le Docteur Elise Bernard, jeune vétérinaire diplômée de l’école de Toulouse en 2019, et titulaire d’un Diplôme d'Ecole (DE) en anesthésie et analgésie, pratique depuis fin août 2019 au sein de la clinique vétérinaire « Mon Chat et Moi » (44). La télémédecine faisait partie des projets de développement de la clinique. Dès son arrivée, le Docteur Bernard a œuvré pour la mise en place de ce service et en parle avec beaucoup d’enthousiasme.

Comment proposez-vous ce service ?

Nous avons commencé à proposer des téléconsultations pour les personnes qui habitent loin, ou qui ont des chats peu faciles à transporter. Nous avons tout de suite vu l’utilité de ce service, si l’animal n’a pas besoin de soins particuliers. En post-opératoire, c’est un outil précieux pour réaliser un contrôle, notamment après une stérilisation, pour une simple vérification de la plaie. Pour des conseils d’alimentation, la téléconsultation est également l’outil idéal. Enfin, la téléconsultation est particulièrement intéressante pour l’analyse du comportement, car on peut voir l’animal dans son environnement habituel.

Nous utilisons aussi beaucoup le système de tchat pour les animaux malades. Pour améliorer le suivi d’un animal, nous ouvrons un dialogue avec son propriétaire, afin d’avoir des nouvelles sur plusieurs semaines, les conseiller, lui indiquer la marche à suivre. Les gens n’en abusent pas et posent des questions pertinentes. C’est pratique pour nous : le message tombe, c’est moins dérangeant que le téléphone, tout le monde y a accès et peut répondre, y compris les ASV si cela relève de leur compétence. Nous nous appliquons à répondre en général dans les 4 heures, sur les horaires d’ouverture. Moins chronophage que le téléphone, ce système nous permet de garder l’historique tant que le tchat est ouvert, puis de l’extraire et de l’ajouter ensuite au dossier. A l’inverse, ce système est utile aussi lorsque l’on hospitalise l’animal pour une journée (ou plus). Il nous permet de donner des nouvelles aux propriétaires, de leur envoyer des photos et de les rassurer.

Tous les clients sont-ils intéressés par ce type de service ?

Le service de messagerie instantanée est déjà bien utilisé.  Nous avons actuellement 32 dossiers ouverts. Concernant la téléconsultation, elle est proposée à nos clients sur une demande de leur part. Nous n’en sommes qu’au début. La consultation au cabinet est encore la règle. Une téléconsultation est facturée au même prix qu’une consultation. Le propriétaire règle à l’avance par le logiciel, et le paiement est confirmé à la fin de la consultation. C’est réellement une bonne expérience au sein de notre clinique. Nous avons une clientèle très connectée qui apprécie le service et nous fait de bons retours.